On en a déjà parlé dans un post précédent : j’ai une obsession pour la théorie.
Pas parce qu’elle m’offre la possibilité de l’abstraction, mais parce qu’elle m’offre le luxe d’un regard d’ensemble, intégral, et, si pas exhaustif, du moins suffisant quant à l’étendue du chaos qui nous englobe.
Dans cette optique, je réfléchis, depuis trois ans maintenant, à une théorie intégrale de l’entrepreneuriat.
Ce travail m’a vu penser le Modèle des 5 piliers.
Puis le Modèle TVM (Traction - Momentum - Viabilité).
Mais il manquait quelque chose. Quelque chose de moins séquentiel, d’encore plus métaphysique, qui nous permette de comprendre le fonctionnement profond et naturel d’une entreprise.
Ce modèle, je crois que je l’ai trouvé :
(Je vous prie d’excuser la calligraphie approximative de fin de journée.)
On retrouve, dans ce schéma, l’intégralité des composantes d’un business florissant.
Détaillons-le ensemble.
1. Flywheel
Le premier élément notoire est celui de la transmutation d’énergie, caractérisé par le Système Input → Output → Outcome → Feedback.
La fonction première d’une entreprise est de transmuter une certaine quantité de ressources (temps, énergies et argent) en une série d’items dont la quantité de valeur est excédentaire comparée aux ressources investies.
En gros : une entreprise investit 100€ dans la production d’un objet. Cet objet génère 250€ de valeur pour son client, que ce dernier est donc prêt à payer 150€. L’entreprise a donc généré un excédent de valeur brut de 150€, pour une valeur nette captée (ou marge) de 50€.
Pour ce faire, l’entrepreneur doit élaborer un système qui lui permet d’opérer cette transmutation de manière rentable et prévisible. Ce que la suite Input → Output → Outcome → Feedback permet précisément de faire.
Input
L’Input, c’est la ressource que tu investis au préalable. Autrement dit, l’action que tu accomplis pour produire le résultat escompté.
(Exemple : prospecter 50 leads par jour.)
Output
L’Output, c’est le résultat obtenu suite à l’accomplissement de l’Input. Celui-ci ne peut être qu’équivalent ou inférieur en charge de valeur unitaire.
(Exemple : pour 50 leads prospectés, je ne peux obtenir que 50 réponses au maximum. Souvent moins.)
La qualité et la prédictibilité de la conversion des Inputs en Outputs se fait par le biais d’un asset principal : le process qui les sépare.
Outcome
Cet Output est ce qui permet la transmutation telle qu’on l’entend. On parle ici d’Outcome, qui peut prendre deux formes : monétaire (cash) ou data (knowledge), celles-ci n’étant pas mutuellement exclusives.
(Exemple : signer 5 prospects ayant répondu en clients = génération de cash et de feedbacks.)
C’est cet Outcome qui matérialise la transmutation capitalistique. Autrement dit, l’Outcome est le fruit de la transformation des ressources énergétiques investies au préalable en un incrément dont la quantité de valeur est excédentaire, celle-ci pouvant être un multiple de la valeur initiale.
C’est en captant cette valeur excédentaire qu’elle a elle-même générée pour le compte de ses clients que l’entreprise de rémunère et se développe.
Comment s’opère ce processus ?
Par le biais d’effets de levier.
Leviers
Cette liste n’est pas complète, mais est représentative des leviers principaux (et les plus impactants).
Si je devais dresser une liste aussi exhaustive que possible, j’en énumérerais 13 :
1. Tes talents, que tu recrutes, promeux et formes.
2. Tes clients, dont tu augmentes la Lifetime Value.
3. Ta marque, fruit de ta réputation et de ton positionnement.
4. Tes médias, qui te rendent visible auprès d’une audience ciblée.
5. La technologie, qui peut être numérique ou intellectuelle.
6. Ta connaissance du marché, qui t’expose à des opportunités plus ou moins confidentielles.
7. La finance, par le biais de financements externes (emprunts ou levées).
8. Ton réseau, qui t’ouvre des portes qui resteraient fermées en temps normal.
9. Ton Business Model.
10. Tes compétences.
11. La conjoncture.
12. Ton produit.
13. Ton offre.
Il est important de noter que ces leviers ne sont pas mutuellement exclusifs, mais sont, au contraire, collectivement exhaustifs. Autrement dit, ceux-ci s’interconnectent, se cumulent et se nourrissent pour magnifier l’Outcome.
Exemple : l’indice multiplicateur de mon Output (prospects générés) en Outcome (cash) est déterminé par la synergie entre la qualité du Produit, de mon Offre, des commerciaux (People) qui la vendent, de mes Clients existants, de ma marque, etc.. En creusent plus profondément, on réalise que ces leviers résultent eux-mêmes de ma connaissance marché.
On pourrait être tenté de penser que la seule fonction d’une entreprise est la génération d’une quantité maximale d’Outcome à un instant-T.
Cette conception est partielle, voire erronée.
En tant que système, la fonction de l’entreprise est, au contraire, d’utiliser les Outcomes générés pour les réinjecter en tant que nouveau combustible. Ce faisant, le système génère un effet cumulatif qui lui permet de grossir en continu :
L’entreprise peut générer plus d’Inputs que lors de la révolution précédentes.
Elle génère donc, de fait, plus d’Outputs, soit par la dit augmentation des Inputs, soit par l’amélioration du Process.
Ces Outputs génèrent, à leur tour, plus d’Outcome, par l’amélioration progressive et continue des différents leviers intermédiaires.
Et la boucle est bouclée, en une Flywheel qui n’en finit plus de tourner.
On parle alors de “Feedback Loop”.
Feedback Loop
Celle-ci consiste en un réinvestissement systématique des deux ressources générées par l’Outcome :
Le cash (l’argent obtenu en cours de route).
Le knowledge (savoir-faire, expérience et data engrangées en cours de route).
Pour résumer
La force de ce modèle est qu’il nous permet d’identifier les principaux éléments constitutifs d’une entreprise en croissance pérenne et durable :
Une quantité d’actions générées en continu et en quantités suffisantes.
Des process qui permettent de convertir ces ressources investies en résultats tangibles.
Des leviers qui transmutent ces résultats en surplus de valeur.
Un réinvestissement méthodique et constant de ce surplus de valeur.
Il nous permet également d’appréhender l’élément-clé sous-jacent du bon fonctionnement de ce système : le facteur Temps. Car le performance du système dans son ensemble est indexé sur son nombre de révolutions successives, on comprend que plus le système tourne, plus celui-ci est amené à générer une quantité toujours plus importante de valeur.
En d’autres termes, un des facteurs les plus cruciaux (et les plus sous-côtés) d’une entreprise est sa durée de vie. Ses chances de survie et son niveau de développement sont en très étroite corrélation avec son nombre d’anniversaires.
Ce à une condition : s’assurer de magnifier ses assets de façon continue.
On en vient à la deuxième composante de ce modèle : l’équation de croissance.
2. La Growth Equation
On peut prédire, ou du moins estimer la quantité d’Outcome et l’augmentation de cette quantité dans le temps (donc l’ampleur et la vélocité de la croissance ou de scale) d’un système entrepreneurial à l’aune d’une simple équation.
Cette équation, la voici :
La “Frequency of Input” (FoI) désigne, comme son nom l’indique, la fréquence à laquelle l’Action de départ est produite. Elle est le combustible primaire, l’essence qui met le moteur en mouvement. L’idée de fréquence inclut les deux variables-clés d’un input performant : sa quantité et sa régularité.
La “Predicability of Output” (PoO) désigne, quant à elle, le degré de prédictibilité des résultats obtenus suite à la production des Inputs. Le moteur qui brûle le combustible pour faire avancer la machine. La prédictibilité englobe, là aussi, deux sous-variables élémentaires : la qualité des process et la densité de talent (et d’expérience) au sein de l’entreprise.
Enfin, la “Quality of Leverages” (QoL) désigne la faculté des différents leviers à multiplier le produit obtenu par la division : FoI ÷ PoO. Il est un coefficient multiplicateur. La série d’engrenages qui permet à la machine de prendre toujours plus de vitesse.
Alors, oui : présenté comme ça, la démonstration peut paraître abstraite. Et elle l’est.
Prenons donc quelques exemples concrets.
Dans le cas de la prospection, l’équation ressemblerait à :
(Nombre de nouveaux leads contactés chaque semaine
÷ Taux de conversion moyen en RDV qualifiés)
* Taux de closing moyen (levier Talent)
* Prix du produit (leviers Produit et Offre)
= Outcome sur une période donnée
En transposant chaque item aux chiffres qui lui sont liés, on obtient quelque chose qui ressemble à :
(1000 nouveaux leads contactés par mois
÷ 10% de conversion en RDV)
* 20% de closing
* 5000€
= 100000€ par mois
Grâce à cette équation, on peut donc, au vu des différents assets du système entrepreneurial à disposition, estimer la quantité d’Outcome générés sur un mois d’exercice.
Et la beauté de cette équation, c’est qu’elle peut s’appliquer à tous les pans du système.
Ce n’est pas une formule mathématique rigoureuse.
C’est un modèle mental.
Conclusion
Ces deux modèles mentaux complémentaires englobent peu ou proue tout ce qui fait la croissance et le succès d’une entreprise :
Un système cyclique qui transforme les actions en actions en résultats et les résultats en nouvelles ressources à réinvestir.
Une inclusion par design du facteur temps au sein du processus de croissance.
Une approche mathématique de ce processus.
– Benoît 🌱🌳
Pour m’aider à développer Brain Dump :
Hyper intéressante cette modélisation, merci beaucopu 🙏 Je me demande s'il ne faudrait pas affiner un peu plus les leviers en les répartissant entre la partie input → output et la partie output → outcome.
Par exemple pour moi, produit et talent sont plutôt localisés au niveau de la transformation de l'input en output. Pour une boîte SaaS, le produit stricto sensu c'est l'output. Et la qualité de tes people va influencer également leur capacité à produire un output de grande qualité à input donné. En plus d'aider à magnifier l'output pour obtenir un outcome encore plus élevé.
Pareil aussi pour la notion de process, en soi, ça peut aussi largement être vu comme un leverage (plus mon process est efficace plus j'arrive à faire beaucoup à partir de peu / moins mon process est efficace, plus je gâche ce que j'ai en entrée).
Une manière de re-modéliser ça pourrait être de mettre "transformation" à la place de "process" entre input et output puis "transmutation" entre output et outcome.
Derrière tu as des effets de levier plutôt orientés "production" / back-office ⇒ transformation ; et des effets de levier plutôt orientés "distribution" / front-office ⇒ transmutation.
Bonsoir Benoît,
Merci de ce partage très interessant.
En bon lecteur assidue de tes news, mais aussi moi même très stimulé et très intéressé par la théorie...je te conseille -si tu ne connais pas déjà 😇- de jeter un œil 👀 à un tout petit livre qui s’appelle « l’effet volant » 😉 : L'effet volant https://amzn.eu/d/9jzNdkp
Tu devrais y trouver de quoi phosphorer 5 min 🤯.
Merci pour tout ce que tu fais et tout ce que tu partages.
Belle soirée.
Thomas